mardi 23 septembre 2008

Tennis-Borg: «J'adore voir Federer et Nadal »

23/09/2008 10:40

Tennis - Borg : «J'adore voir Federer et Nadal»


Dans ce premier volet, le champion suédois évoque l'importance que revêt la Coupe Davis à ses yeux, et nous livre son analyse sur l'évolution du jeu.
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Il est l'un des joueurs dont on a le plus parlé en 2008. Et pourtant, cela fait 27 ans qu'il n'a plus gagné de Grand Chelem. Lui, c'est l'éternel Björn Borg, six Roland-Garros et cinq Wimbledon à son actif, un palmarès hors du commun et une lignée de records. Cette année, Rafael Nadal l'a rejoint dans l'histoire du tennis en remportant, comme le Suédois l'avait fait en 1981, un quatrième Roland-Garros d'affilée et en réussissant le doublé à Wimbledon, un exploit que le Suédois avait accompli... trois fois consécutivement entre 1978 et 1980.


L'ancien n°1 mondial, qui avoue «avoir toujours l'amour de la compétition» devait participer le week-end dernier au Trophée Jean-Luc Lagardère mais une blessure à l'épaule droite l'a contraint à renoncer. Pour autant, il était bien présent à la Croix-Catelan, siège du Lagardère Paris Racing, où se tenait la 5e édition de ce tournoi du circuit seniors. Cheveux aussi blancs qu'ils étaient blonds par le passé, jeans noir et chemise blanche à pois, le sextuple vainqueur Porte d'Auteuil, désormais âgé de 52 ans, a toujours une classe folle, même sans raquette en bois ni polos à rayures. Entretien avec une légende.


« Björn Borg, cette année, Rafael Nadal a remporté comme vous un quatrième Roland-Garros consécutif assorti d'un doublé à Wimbledon, le premier depuis le vôtre en 1980. A chaque fois, vous étiez dans les tribunes...
J'adore voir Federer et Nadal s'affronter. Depuis plusieurs saisons, leurs confrontations sont d'un niveau incroyable, spécialement cette année lors de la finale de Wimbledon (Victoire de Nadal 6-4, 6-4, 6-7[5], 6-7[8], 9-7 ndlr). C'est l'un des meilleurs matches de tous les temps. C'est en tout cas le meilleur match que j'ai jamais vu et j'en ai vus beaucoup. Il va falloir sans doute attendre plusieurs années avant de revoir une finale d'un tel niveau. Assister à de tels matches, c'est du pur plaisir. En plus, ce sont deux joueurs aux personnalités différentes. Federer est très calme et semble très facile quand il joue. Chez Nadal, il y a davantage cette dimension physique. Quand je les vois jouer, je n'ai pas de favori. J'espère qu'à l'avenir ils vont encore s'affronter à de nombreuses reprises.


Comment expliquez-vous qu'entre vous et Nadal, il ait fallu attendre 28 ans pour qu'un joueur réalise le doublé Roland-Garros - Wimbledon ?
C'est dur de gagner sur la terre battue et d'être au top sur gazon deux semaines plus tard. On passe d'une surface lente à une surface rapide, même si elle l'est moins que par le passé. À Wimbledon, il faut franchir sans encombre les deux-trois premiers tours pour s'habituer au gazon. Cette année, Nadal jouait déjà un tennis incroyable au Queen's, quelques jours seulement après sa victoire à Paris. Il a dû beaucoup s'entraîner sur gazon. Je n'ai pas été surpris qu'il remporte Wimbledon. Dès la finale de l'an passé, qu'il avait perdue en cinq sets, j'en avais fait mon favori pour cette édition. Nadal a tous les coups du tennis. Il a fait beaucoup de progrès, notamment sur surface rapide. C'est bien que quelqu'un ait à nouveau remporté ces deux tournois. Et peut-être que Nadal le refera l'an prochain, ou Federer, voire Djokovic. Les records, les miens et ceux des autres sports, sont faits pour être battus. Lorsque Federer a eu la possibilité cette année de battre mon record de cinq titres consécutifs à Wimbledon, cela m'importait peu.


«La Coupe Davis, un des grands moments de ma vie»


Comme vous, Nadal semble avoir des difficultés à s'imposer à l'US Open...
(Rires) À New York, c'est une atmosphère différente. Je suis passé près du titre à plusieurs reprises (quatre fois finaliste, en 1976, 78, 80 et 81 ndlr). Nadal a lui aussi plutôt bien joué cette année. Remporter un Grand Chelem, c'est difficile. Il faut être à 100% pendant deux semaines. À l'époque, je me préparais parfaitement mais je n'ai jamais gagné, c'est aussi simple que cela. Je pense que Nadal l'emportera un jour. Cela prendra peut-être du temps. Il semble plus à l'aise sur terre battue ou sur gazon que sur dur. Mais maintenant qu'il est n°1 mondial, je pense qu'il va finir par remporter l'US Open.


Comme vous, Nadal semble attaché à la Coupe Davis, que vous aviez vous aussi remportée en 1975. Dans cette épreuve, vous aviez même disputé - et gagné - votre premier match à l'âge de 15 ans. Quelle place tient cette compétition dans votre immense palmarès ?
Représenter son pays, c'est quelque chose de grand, particulièrement en Suède. Quand j'avais 7-8 ans et que je commençais le tennis, j'avais deux rêves : participer à la Coupe Davis et disputer Wimbledon. J'ai grandi avec la Coupe Davis et j'ai eu la chance de la remporter et cela a été l'un des grands moments de ma vie. Être capitaine de l'équipe ? On me l'a demandé par le passé. Mais c'est une grande responsabilité. Pour faire du bon boulot, il faut suivre les joueurs toute l'année. Je pense que Mats Wilander est un excellent capitaine. Personnellement, je préfère travailler à la base, avec les jeunes.


Björn Borg, Mats Wilander, Stefan Edberg..., les Suédois ont été nombreux à la place de n°1 mondiale. Mais aujourd'hui, Robin Söderling est 34e et Thomas Johansson reste le dernier de vos compatriotes à avoir remporté un tournoi du Grand Chelem, en 2002, en Australie. Comment l'expliquez-vous ?
À une époque, on a vraiment été gâtés, c'est vrai. On avait trois-quatre joueurs de top niveau. Mais il n'y avait pas de formation à la suédoise derrière. Sur les cinq dernières années, nous avons eu de bons joueurs et aujourd'hui, nous avons enfin une organisation autour des juniors, avec un bon encadrement au sein de la fédération. Dans les cinq ans à venir, on devrait voir émerger de nouveaux talents venus de Suède. Ici, en France, vous avez déjà tellement de bons joueurs. C'est incroyable. Je pense que l'un d'entre eux va bientôt remporter un Grand Chelem mais dire lequel et quand, c'est impossible. (Richard) Gasquet me paraît armé pour gagner Wimbledon un jour.»

Propos recueillis par Nicolas ROUYER

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